L’activité bestiale dont l’Amérique nous fournit le modèle, et qui tend déjà si grossièrement à uniformiser les mœurs, aura pour conséquence dernière de tenir chaque génération en haleine au point de rendre impossible toute espèce de tradition.


N’ayant jamais entrevu que de loin ce que les bulletins diocésains appellent les milieux catholiques, il s’est fait du dévot une idée à la fois injuste et charmante, celle d’un homme un peu naïf, chaste, d’intelligence médiocre, mal portant, mal vêtu, qui sent le cierge, se signe au nom de Voltaire, possède contre le diable une demi-douzaine de recettes sûres, méticuleux avec un brin d’avarice, mais d’ailleurs trop facile à duper pour n’être pas imaginatif et sensible. Aux seuls mots d’enfant prodigue et de conversion, le bonhomme inondé de larmes ouvrira les bras, tuera le veau… Si ridicule que cela paraisse, une telle image d’Epinal est admirablement tolérée par le cerveau de plus d’un professeur de scepticisme, chez qui survit, moins rarement qu’on ne pense,  dégradé jusqu’à n’être plus qu’une sorte de fétichisme machinal, l’humble respect de tant de grand-mères pour tout ce qui approche de l’autel, du curé au dernier chantre.