Paris, Librairie Pierre Téqui, 2010.

Jacques Keryell, né en 1930, arabisant et islamisant, a été un ami personnel de Louis Massignon. Diplômé du Centre International d’Etudes philosophiques et théologiques de Toulouse, il a pratiqué la céramique arabo-persanne pendant trente-cinq ans. Il est membre de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts d’Angers et a séjourné vingt ans au Maghreb et au Machreq.


Jacques Maritain dans sa Réponse à Jean Cocteau : « Je sais les erreurs qui ravagent le monde moderne, et qu’il n’a de grand que sa douleur, mais je respecte cette douleur ; je vois partout des vérités captives, quel Ordre de la Merci se lèvera pour les racheter ? Notre affaire est de chercher le positif en toutes choses, d’user du vrai, moins pour frapper que pour guérir. Il y a si peu d’amour dans le monde, les cœurs sont si froids, si gelés, même chez ceux qui ont raison, les seuls qui pourraient aider les autres. Il faut avoir l’esprit dur et le cœur doux. Sans compter les esprits mous au cœur sec, le monde n’est presque fait que d’esprits durs au cœur sec et de cœurs doux à l’esprit mou. » p. 18.


La conversion est un passage de la vie selon la chair à une vie selon l’Esprit. L’adhésion à la foi de l’Eglise exige une conversion morale, par la configuration au Christ. Si le but de tout grand système moral consiste pour l’homme à chercher à dépasser, en quelque façon, sa condition naturelle en s’attachant à un bien supérieur ou en déifiant la nature, nulle part il n’est cependant question de transcender cette condition humaine. Et Massignon dut attendre de retrouver la foi chrétienne pour pouvoir, par la grâce de Dieu, transcender sa condition. Cela signifie non la subir, ni la refuser, mais l’accepter et l’assumer totalement par amour. La condition humaine n’est pas changée, mais c’est cette nature blessée qui est vivifiée de l’intérieur, surélevée dans l’ordre de la grâce. C’est un homme faible et pécheur qui, désormais, peut partager l’amitié divine et est appelé à la vie éternelle de Dieu. pp. 164-165.


Reprenant la sentence célèbre de Léon Bloy, il dira plus tard : « La seule cause de tristesse ici-bas est de ne pas être saint. » p. 167.