Paris, Editions Parole et Silence, 2004.

Le frère Thierry-Dominique Humbrecht, dominicain, docteur en philosophie et en théologie, dirige la collection Bibliothèque de la Revue thomiste.


Puisses-tu, au moins, être un caractère. Juge par toi-même, donne le ton. Notre société devrait susciter des résistants, des âmes fortes qui se démarquent d’elle, des visionnaires qui refusent le consensus et qui créent l’avenir. L’Evangile devrait être l’arbitre de la vie sociale, et non sa honte. (…) Tu n’as pas à être comme les autres, mais à être toi-même, avec les autres et pour les autres. Tu seras toi-même si tu aimes le Christ et si tu cherches ta vocation. pp. 11-12.


Ta vocation, c’est l’ensemble de tes actes, bien plus que ton rêve. Ton rêve est « le plus beau poème, celui qui n’est jamais écrit », dont le seul défaut est de ne jamais exister, alors que tes actes sont ta vie même, ta vie en train de vivre. Ne rêve pas ta vie, pose des actes ! Seuls ceux qui ne font rien ne se trompent jamais, mais leur vie même est une erreur ! p. 17.


La passion est le désir d’être aimé, plus encore que d’aimer. (…) La passion est bonne puisqu’elle lance l’amour à ses débuts. Elle est la flamme qui est nécessaire au feu. A la différence de la passion, l’amour se nourrit non plus de l’absence de l’aimé(e) et de son idéalisation, mais de sa présence. (…) La passion prend, l’amour donne. pp. 39-40.


Ce qui s’use c’est la passion ; l’amour, au contraire, ne cesse de s’approfondir. L’engagement sauve l’amour et même le sentiment amoureux ; mais il marque la fin de la saison de la chasse. pp. 40-41.


Si tu te crois ignorant, étudie. (…) Tu es responsable de l’approfondissement de ta foi, la paresse n’a aucun droit. p. 42.


Si tu attends que Dieu agisse à ta place ou bien te dicte ce que tu dois faire, tu risques d’attendre longtemps. Ce n’est pas ainsi que Dieu gouverne, il se refuse à faire de nous ses marionnettes. (…) Les signes ne sont pas des interventions magiques de Dieu, mais sa présence que tu lis dans certains événements qui t’arrivent. Cela s’appelle interpréter ou discerner. p. 43.


Peut-on manquer sa vocation ? Cela peut arriver, lorsqu’on a laissé passer l’occasion par peur de renoncer aux autres. Ce n’est pas de la malchance, mais plutôt l’idée selon laquelle la vocation doit réaliser immédiatement l’épanouissement de soi. La recherche de sa vocation subit le même risque de réduction du spirituel à l’humain que le domaine de la foi ou de la prière. La foi se réduit au sentiment, et le sentiment à la recherche du bien-être. La vocation devient une recherche de plus du bien-être. Bien sûr, on ne s’en rend pas compte, mais c’est une donnée très présente. La sainteté consiste-elle à s’épanouir (fût-ce en Dieu, ou en une vie supposée spirituelle) ou bien à exercer sa générosité, à se donner tout entier à la grâce, par grâce ? Se donner, c’est se dépenser, se fatiguer pour autrui, se perdre, se laisser crucifier par le Christ. pp. 99-100.