Un bon négociateur ne doit jamais fonder le succès de ses négociations sur de fausses promesses et sur des manquements de foi. C’est une erreur de croire, suivant l’opinion vulgaire, qu’il faut qu’un habile ministre soit un grand maître en l’art de fourber. La fourberie est un effet de la petitesse de l’esprit de celui qui la met en usage, et c’est une marque qu’il n’a pas assez d’étendue pour trouver les moyens de parvenir à ses fins par les voies justes et raisonnables. On demeure d’accord qu’elle le fait souvent réussir, mais toujours moins solidement, parce qu’elle laisse la haine et le désir de vengeance dans le coeur de ceux qu’il a trompés et qui lui en font tôt ou tard ressentir les effets.


C’est un des plus grands secrets de l’art de négocier que de savoir, pour ainsi dire, distiller goûte à goûte dans l’esprit de ceux avec qui on négocie les choses qu’on a intérêt de leur persuader.


Un négociateur doit se persuader une fois pour toutes qu’il n’est pas assez autorisé pour réduire tout un pays à se conformer à sa façon de vivre, et qu’il est bien plus raisonnable qu’il s’accommode à celle du pays où il est pour le peu de temps qu’il doit y rester.


Un bon buveur réussit quelquefois mieux qu’un homme sobre à traiter avec les ministres des pays du Nord, pourvu qu’il sache boire sans perdre la raison, en la faisant perdre aux autres.