L’idéologie deutéronomique s’articule en quelques concepts fondamentaux : (1) Yahweh est un dieu unique. (2) Le rapport spécial entre Yahweh et son « peuple élu » est fondé sur un pacte dont le coeur même est constitué par les « tables de la Loi » de Moïse, conservées dans l’arche de Yahweh, elle-même déposée dans le temple de Salomon. (3) Yahweh a fait sortir Israël d’Egypte et lui a donné la terre de Canaan. (4) La terre de Canaan devra être conquise selon les procédés de la « guerre sainte » et du herem. (5) Le peuple a l’obligation d’être fidèle à Yahweh et à sa loi et donc de résister à toute tentation d’apostasie et d’idolâtrie. (6) Yahweh doit avoir un seul temple, celui de Jérusalem, « demeure du nom de Yahweh », sans manifestations cultuelles trop matérielles qui sont ressenties comme étrangères et dangereuses.
Ceux qui avaient été déportés, c’étaient les hommes du Palais (c’est-à-dire les dirigeants politiques), les hommes du Temple (prêtres et scribes), et les propriétaires terriens. Ceux qui étaient restés étaient les membres des communautés villageoises, les paysans pauvres, les serviteurs que les Babyloniens avaient laissés sur place pour cultiver la terre. Les exilés, à Babylone, avaient élaboré une idéologie « forte », celle de la nouvelle alliance, de l’exclusivisme monothéiste, du « reste qui revient ». Ils étaient déterminés, fanatiques, ils avaient des chefs et une structure paramilitaire, ils avaient une classe cultivée, ils avaient des moyens financiers, ils avaient l’appui de la cour impériale. Ceux qui étaient restés étaient incultes, analphabètes, dispersés, sans chef, ils étaient pauvres et sans espérance, sans projet et sans Dieu. L’issue du conflit était évidente dès le début.